Annonce de soutenance de la thèse de doctorat préparée par Oumaima Er-reyyahy

  • Auteur/autrice de la publication :
Oumaima Er-reyyahy
« Analyse et modélisation de la qualité du ciblage territorial de l’investissement public au Maroc »
Vendredi 26 juillet 2024
14h30
Centre Links - Faculté des Sciences Juridiques, Économiques et Sociales Ain Chock, Casablanca

Résumé de la thèse

La présente thèse s’attache à analyser et modéliser la qualité du ciblage territorial de l’investissement public au Maroc. Ce sujet revêt une importance cruciale dans les domaines de l’économie régionale et de l’économie géographique. En explorant la fonction redistributive du budget de l’État à traversles territoires, elle offre des éclairages essentiels sur les défis et les lacunes de l’investissement public, contribuant ainsi, en partie, à expliquer ses sous-performances globales observées à l’échelle nationale.
Avant de procéder à la modélisation de la question centrale pour explorer les relations causales etanalyser le comportement du ciblage territorial de l’investissement public, un travail préliminaire approfondi et une préparation méthodique ont été entrepris, en recourant initialement à des techniques de statistique spatiale avancées et intelligentes. Le premier chapitre pose les fondements nécessaires pour cette analyse, en établissant une cartographie détaillée de l’investissement public à l’échelle territoriale et en identifiant les faits stylisés relatifs à sa distribution spatiale et par secteur institutionnel et département ministériel, sur la base d’un travail fouillé et inédit des données couvrant la période 2012-2021. Il en ressort que l’investissement public en niveau et par tête est concentré dans les deux plus grandes régions du Royaume, sauf qu’en dynamique ce sont les trois régions les moins loties qui enregistrent les taux de croissance les plus élevés débouchant à terme, si une telle dynamique serait maintenue, sur une convergence interrégionale des taux d’investissement public. Cette concentration se double par une domination des fonds alloués à l’investissement au profit de deux départements : l’Equipement et Transport d’une part et l’Agriculture d’autre part. La dernière partie qui conclue le chapitre pose les jalons du débat sur l’approche la plus appropriée pour le ciblage territorial des investissements publics. Et au lieu de mettre dos à dos les deux logiques centralisée (top-down) et décentralisée (bottom-up), nous plaidons pour une démarche qui les réconcilie dans un mode de gouvernance multiniveau.
S’appuyant sur les conclusions du premier chapitre, le deuxième teste empiriquement l’hypothèse de travail selon laquelle l’efficacité de l’investissement public en termes de sa capacité à générer de la richesse et créer de l’emploi serait tributaire de sa localisation et de la nature des interactions spatiales auxquelles donne lieu. Ainsi, la stratégie empirique adoptée, en évaluant à la fois l’effet direct et l’effet indirect interactif et itératif, estime les multiplicateurs locaux de l’investissement public. Ces multiplicateurs mesurent l’ampleur des réactions territoriales différenciées en termes de performances globales de l’investissement, tout en examinant comment ces multiplicateurs évoluent selon les composantes de l’investissement et le niveau de développement des territoires (stock de capital initial).
Les résultats révèlent une variabilité significative des multiplicateurs d’investissement public entre les régions, conditionnée non seulement par la répartition géographique des dépenses publiques d’investissement, mais aussi par la nature des interactions territoriales qui en découlent. Par composantes, les contributions des Etablissements et Entreprises Publics (EEP) et du Budget de l’Etat (BE) influencent différemment les multiplicateurs selon les régions. Des profils régionaux distincts ont ainsi été identifiés. Les régions moins pourvues tirent principalement profit des EEP, tandis que dans les régions mieux dotées, le poids du BE est prépondérant mais n’est pas toujours suffisant pour renverser les effets négatifs observés.
L’interaction entre l’investissement public et le capital initial des régions met en lumière l’existenced’un seuil critique. Au-delà de ce seuil, l’effet initialement négatif de l’investissement public dans les régions mieux dotées se transforme en un effet positif à mesure que le niveau de développement économique s’accroît et gagne en maturité. En revanche, dans les régions moins loties, les effets positifs initiaux des multiplicateurs territoriaux tendent à s’amenuiser à mesure que le niveau de développement initial demeure bas, suggérant ainsi l’existence d’un seuil de développement à partir duquel l’efficacité de l’investissement public s’inverse. Ces résultats remettent en question la théorie du stock initial, qui postule que les multiplicateurs d’investissement sont plus élevés dans les régions moins développées. À l’échelle territoriale marocaine, cette théorie ne trouve pas de validation empirique directe ; au contraire, les conclusions indiquent que le faible niveau de développement initial des régions moins pourvues peut, en réalité, limiter l’efficacité des investissements publics, soulignant la nécessité d’une approche plus nuancée pour maximiser les impacts de l’investissement public en fonction des contextes territoriaux spécifiques.
Dans le troisième chapitre, nous sommes alors conduits à étudier les déterminants de l’efficacité de l’investissement public, en particulier les paramètres explicatifs de la valeur du multiplicateur d’investissement public territorial. En utilisant les résultats des multiplicateurs territoriaux obtenus lors de la phase précédente, nous construisons un indice d’efficacité ex-post de l’investissement public, intégré en tant que variable endogène clé dans le système spatio-temporel élaboré. Les résultats mettent en lumière la complexité et la diversité des paramètres influençant l’efficacité de l’investissement public, lesquels sont à la fois conjoncturels et structurels. Ces effets varient demanière significative entre les régions, reflétant des dynamiques distinctes selon le niveau de développement territorial. Les résultats obtenus mettent également en évidence l’importance des interactions interrégionales illustrant ainsi un effet d’entraînement qui peut soit optimiser, soit compromettre l’efficacité de l’investissement public dans les territoires concernés.
Au cœur de cette analyse, l’objectif est de construire postérieurement un indice d’efficacité ex-antede la distribution territoriale de l’investissement public. Cet indice vise à évaluer si la répartition des investissements, telle que programmée annuellement dans les projets de loi des finances, suit une logique d’efficacité. Cette approche permet de mieux comprendre les mécanismes sous-jacents auciblage territorial de l’investissement public et d’identifier les écarts entre les principes d’efficacité anticipée et la pratique.
La création de l’indice d’efficacité ex-ante ouvre des perspectives essentielles pour l’évaluation de laqualité du ciblage territorial des fonds publics. L’analyse révèle des disparités marquées dans l’efficacité de l’investissement public entre les différentes régions, ainsi que des divergences significatives entre la hiérarchisation territoriale fondée sur l’efficacité anticipée et celle basée sur la répartition territoriale effective de l’investissement public.