La soutenance aura lieu le 07 avril 2021, à 15h, à la Faculté des Sciences Juridiques, Économiques et Sociales Ain chock, Casablanca. La thèse porte sur l’ « Évaluation de la politique en matière d’éducation au Maroc et interférence des caractéristiques socioéconomiques : cas du programme Tayssir ».
Résumé de la thèse :
Les programmes de transferts monétaires sont devenus un moyen efficace pour la réduction de la pauvreté et de la vulnérabilité dans les pays en développement, notamment chez les enfants. Théoriquement, ils sont introduits en vue d’améliorer la fréquentation scolaire, la nutrition, l’utilisation des services de santé et aussi de réduire le travail des enfants (Prado et Dewey, 2014 ; De Hoop et al, 2017).
C’est dans ce contexte que nous nous intéressons dans cette thèse à l’analyse des effets du programme marocain de transferts monétaires conditionnels (Tayssir). Après un chapitre introductif dédié à la présentation et à une discussion autour du système éducatif marocain ainsi qu’à la description des programmes d’appui à la scolarisation. Les deux chapitres suivants s’inscrivent dans une perspective et une démarche d’évaluation des politiques publiques. Nous nous appuyons dans ces deux chapitres sur les données des enquêtes à passages répétés que réalise l’ONDH (2015 pour le chapitre I, puis 2012 et 2015 pour le chapitre II).
À la différence d’études antérieures dont les analyses concluent aux succès sans réserve du programme Tayssir sur les bénéficiaires (Benhassine et al, 2013 ; JPAL, 2012), nous relevons dans le premier chapitre, à l’aide d’une segmentation de la population par strates de niveaux de pauvreté, que ce programme est sans effet significatif sur les enfants censés être ciblés en priorité. Notre démarche a consisté à exclure du champ de comparaison les « passagers clandestins » en recourant à une estimation par variable instrumentale. Nos conclusions suggèrent de ce fait la nécessité d’améliorer les méthodes de ciblage et aussi de rechercher d’autres politiques alternatives et complémentaires pour assister les ménages les plus nécessiteux ainsi que pour réussir leur adhésion à l’intérêt pour l’éducation.
Nous sommes alors conduits dans le second chapitre à aborder une autre dimension des programmes de cash transferts et cherchons ainsi à évaluer l’effet du programme Tayssir sur la pauvreté des enfants pour ensuite mieux comprendre la part des ressources que consacrent les ménages à leur éducation. Nous appliquons la méthode des doubles différences et trouvons que Tayssir est sans effet significatif sur la réduction des indicateurs de pauvreté des enfants appartenant aux catégories sociales les plus pauvres. Dans la continuité de cette démarche, nous recourons à la méthode d’appariement pour analyser la structure de la dépense des ménages et en particulier si le programme a permis d’accroître leur effort éducatif, mesuré par le ratio de leurs dépenses éducatives à leurs dépenses non alimentaires.
La conclusion à laquelle nous aboutissons confirme celle du chapitre précédent quant aux limites du ciblage opéré. Tayssir ne parvient pas à modifier significativement l’effort que fournissent les ménages pour l’éducation.
En s’appuyant sur les résultats des précédents chapitres, le dernier étudie l’implication des parents et sa contribution à expliquer les performances scolaires. En effet quand cette implication est faible, la réussite scolaire est compromise. Or beaucoup de travaux montrent que la propension à l’abandon scolaire est en grande partie liée aux difficultés scolaires (McNeal, 1999 ; Diagne, 2010). Ainsi, l’insuffisante implication parentale (chapitre II) conduit au double échec : en termes de performances des élèves (chapitre III) et de propension à l’abandon (Chapitre I).
Ainsi, à partir des données des enquêtes du programme TIMSS (cette fois-ci), nous étudions dans le chapitre III les facteurs explicatifs des performances scolaires avec comme variable d’intérêt : l’implication parentale. Étant donné la nature des données disponibles, à structure hiérarchique, nous utilisons pour ce faire les modèles multiniveaux pour identifier les effets propres aux caractéristiques des élèves et de leur ménage (niveau 1), les facteurs inhérents à celles des écoles (niveau 2) et enfin les spécificités des régions (niveau 3) dont l’inférence est appréhendée à travers le taux d’analphabétisme. Nous réussissons ainsi à capter le poids des externalités dans la réussite scolaire.
Parmi les résultats saillants, outre l’effet significatif de l’implication parentale sur les performances des élèves, on relève que son impact est plus accentué chez les plus pauvres. Enfin, il apparait que le déficit en matière de conditions d’apprentissage ne se limite pas seulement à l’école publique, mais persiste même au sein de certaines écoles privées.
Globalement, notre recherche a révélé que la réussite d’un système éducatif est complexe, en particulier elle montre que les aides financières ne peuvent à elles seules suffire comme stratégie.
La référence aux expériences d’autres pays nous conduit à recommander par exemple la mise en place de politiques complémentaires telles que les programmes de soutien scolaire, pour pallier l’insuffisant engagement des parents.
Au niveau de la recherche, il importe de s’efforcer de comprendre les motivations profondes de ces derniers et l’intérêt qu’ils portent à l’éducation de leurs enfants, avec idéalement une distinction des genres.